Les aventures de Bulul & Gaston Damag
L’histoire débute de la manière suivante :Un homme (Gaston Damag) découvre un jour qu’il fait l’objet d’études, de colloques, de dissertations savantes, que sa vie, la manière de vivre de sa famille et de ses ancêtres, intéresse les chercheurs qui en discutent, qui en analysent les moindres détails, qui présentent quelques documents à l’American Museum of Natural History de New York dans une exposition consacrée aux civilisations du Pacifique où il découvre une photographie de ses oncles.
Voilà qu’il est à la fois un homme et une pièce de musée.Et le dieu du riz (Bulul), que ses oncles, lui-même et toutes les personnes autour de lui, le dieu des récoltes qui intervient lorsqu’il est sollicité, qui change le cours des évènements, qui rend la terre riche et les femmes fertiles, qui éloigne la maladie et les soucis quotidiens, à qui on sacrifie vaches, cochons, poulets, Bulul est lui aussi un sujet de science. Dieu Bulul, tu es une pièce de musée, toi aussi, une statuette de bois dont on observe la beauté, les proportions, la facture. On loue les courageux navigateurs et les clairvoyants archéologues qui t’ont amené jusqu’aux portes du Museum ; on félicite les conservateurs avisés.Vous êtes tous deux exotiques ; Gaston et Bulul.
Mais l’homme (l’artiste) sait que le dieu domestique n’est pas enfermé dans un morceau de bois, que les siens ne sont pas réduits à quelques vieilles photographies, que l’on peut être ceci et cela tout à la fois : l’apparence curieuse pour les uns et la fraternité de la vie pour les autres. Alors, dans une joyeuse exubérance, vite, pressée par l’urgence, il mêle les figures dans des images rapides, jetées et nombreuses. Il faut tout mélanger, tout bouleverser, tout faire passer cul par-dessus tête, copuler, avoir des plaisirs de toutes les manières possibles, hors des normes et des emprisonnements. Seule solution, seule vérité : la vie, l’énergie, le déduit, et voir, comme dans un miroir, l’autre que l’on aime.
Laurent Busine
Laurent Busine est un historien de l’art belge né le 6 janvier 1951 à Chatelet (Belgique). Après avoir dirigé, depuis 1978, les expositions du Palais des Beaux-Arts de Charleroi, il prend la direction du MAC’s en janvier 2002. Pendant ces années passées au Palais des Beaux-Arts, il marquera, pendant vingt ans, la vie culturelle de la métropole wallonne, en organisant des expositions consacrées à Rodin, Picasso, Dali ou Schiele mais aussi, avec la présentation de la collection Prinzhorn de dessins de malades mentaux et avec les premières grandes expos de jeunes artistes. Laurent Busine a publié la monographie de Giuseppe Penone en 2013.
Vue d’exposition – Galerie Maïa Muller, Copyright Rebecca Fanuele